Frog of War, un projet d’aide à la gestion des risques professionnels des reporters de guerre

“Frog of War” est un collectif intergénérationnel de reporters de guerre, qui s’est fixé pour objectif de réduire les risques professionnels inhérents à une couverture des conflits ou des crises, en cherchant des réponses adaptées à chaque journaliste, quel que soit son statut, en rédaction ou bien pigiste.

Comprendre les enjeux

Le tout premier devoir du journaliste est d’informer. Le reporter de guerre peut donc être amené à accepter un certain niveau de risque personnel pour répondre aux attentes éditoriales du public et des médias. C’est cette vocation particulière qui l’amène à se rendre dans des zones de guerre ou en crise, abandonnées par les populations, voire par les ONG, et où n’opèrent plus que des militaires ou des groupes armés.
Or paradoxalement, si les armées et les organisations humanitaires ont de longue date mis en œuvre des procédures de formation, d’assurance et d’accompagnement pour leurs personnels, ce n’est pas encore systématiquement le cas pour les médias. Et l’accès aux prestations existantes reste difficile pour les journalistes débutants qui disposent de moyens limités pour se lancer.

La préservation de l’intégrité physique et psychologique des reporters est pourtant un enjeu majeur si l’on veut garantir l’avenir de notre métier. Car les journalistes, comme le personnel des ONG, sont désormais régulièrement pris pour cible par les combattants. Si les médias se vivent encore comme des témoins professionnels relativement neutres, ils sont en fait perçus par les belligérants comme des acteurs de la guerre, car la presse exerce un impact fort sur les opinions publiques dont les parties prenantes au conflit veulent s’assurer le contrôle.

Ces nouvelles menaces sur les journalistes peuvent entraîner des risques juridiques, financiers et réputationnels importants pour les médias diffuseurs qui ont donc parfois été tentés de réduire leur couverture des zones de conflit, voire de ne plus y employer de pigistes. Sur le conseil de ses avocats et de ses compagnies d’assurance, la presse anglo-saxonne a choisi de recourir à des agents de sécurité, anciens soldats chargés d’encadrer les reporters. Cette pratique, extrêmement coûteuse, pose de plus de sérieux problèmes éditoriaux et déontologiques.

Notre objectif :

Nous voulons développer l’adoption d’une approche pragmatique qui permette de résoudre ces tensions naturelles qui existent entre les enjeux sécuritaires et éditoriaux en s’appuyant sur une méthode d’analyse des risques solide, comme le font les ONG ou les Armées, mais qui soit adaptée aux besoins spécifiques des journalistes. Nous proposons également des solutions complètes, avec des outils pratiques et abordables dans les domaines de la formation, de l’équipement, de l’assurance et de la communication, pour tous les reporters voulant se rendre dans des zones de guerre, qu’ils soient pigistes ou en rédaction.


En partant de nos expériences de terrain, nous avons engagé un travail de réflexion avec des responsables des secteurs de la presse, de la mutualité, de l’assurance, du juridique, de la formation, du premier secours, de l’équipement, de la sécurité informatique et de la télécommunication pour développer une offre en cohérence avec les impératifs de sécurité, l’éthique journalistique et les attentes éditoriales. Nous avons initié la création d’un fond de dotation qui permettra d’aider les jeunes pigistes à financer la préparation de leurs reportages en zones dangereuses.

Avec nos partenaires spécialisés dans la sécurisation des opérations des organisations humanitaires, nous avons élaboré un cursus de formation adapté au reportage en zone de crises qui soit en cohérence avec nos besoins professionnels, car un journaliste travaille souvent seul ou en toutes petites équipes. Il doit pouvoir identifier les menaces pour les contourner et non pas pour les affronter, prendre des décisions avisées de déplacement et pour cela, être en mesure d’analyser un environnement de combat, une zone minée, réaliser des gestes simples de premier secours.

Avec nos partenaires des associations cyber éthique, nous développons des moyens et des pratiques permettant de protéger les données numériques au cours d’un reportage. Un journaliste doit être capable de transmettre ses informations dans des conditions de sécurité optimales, tout en protégeant ses contacts et ses sources.

Avec nos partenaires de la mutualité, nous proposons une police d’assurance solidaire couvrant spécifiquement les risques encourus dans les zones de guerre. Nous allons également mettre sur pied un fond de dotation qui permettra de proposer aux journalistes qui nous rejoindront la prise en charge d’une partie des formations, des équipements de protection individuels, du matériel de communication sécurisé et de l’assurance en échange d’une participation à la vie du collectif, à l’animation de son site web et de ses réseaux sociaux, ainsi que par un partage sécurisé des informations sur la situation de terrain dans les conflits couverts.

Nous croyons à l’action collective tout en respectant les choix individuels de chacun. Le journalisme n’est pas une secte et les reporters sont naturellement jaloux de leur indépendance, car elle est au cœur de leur travail et fonde leur crédibilité. Pour autant, notre principe fondateur est celui de la solidarité intergénérationnelle ainsi que de la transmission entre collègues au-delà des frictions de la concurrence. Dans ce cadre, les reporters qui adhérent au collectif s’engagent moralement à aider au développement de « Frog of War », par le partage et par l’échange de leurs expériences de terrain, de façon éthique et professionnelle, avec les autres membres du collectif, en s’appuyant sur les moyens de cette plateforme dont ils assurent en partie l’animation.

Un projet soutenu par la profession